vendredi 29 septembre 2017

Fâcheries

Les relations humaines n'étant pas toujours caractérisées par l'harmonie la plus complète, nous avons voulu nous intéresser aux expressions qui qualifient les rapports humains conflictuels.

Dans le billet "Vous prendrez bien une veste", nous avions déjà évoqué la situation inconfortable d'une personne qui se prend un râteau. Mais on peut tout aussi bien se prendre un vent ou, si l'on change de point de vue, mettre un vent à quelqu'un. L'origine de cette expression, assez récente, est difficile à cerner. Précisons d'emblée qu'a priori le vent dont il est question ici n'a rien à voir avec les conséquences métaboliques de la consommation de cassoulet ou de soupe à l'oignon… On se prend un vent en particulier lorsqu'on échoue dans une tentative de séduction : le séducteur entreprenant s'approche du visage d'une personne pour l'embrasser et, à la dernière seconde, celle-ci se dérobe en se détournant, laissant notre séducteur en quelque sorte dans le vent.

Restons dans le domaine aérologique avec deux expressions très imagées – à l'étymologie assez mystérieuse – pour qualifier des remontrances ou un rappel à l'ordre énergique : se prendre une soufflante et se faire souffler dans les bronches. S'agirait-il de la sensation éprouvée par la "victime" lorsque l'auteur de l'engueulade lui crie dessus en se rapprochant de son visage ? Peut-être. Synonyme : se faire remonter les bretelles, avec ici deux étymologies possibles : au cours d'une bagarre l'un des protagonistes saisit l'autre par les bretelles et le secoue pour le ramener à la raison. Ou bien, quand les bretelles d'une personne sont mal fixées ou détendues, le porteur de ces dernières peut avoir assez mauvaise allure avec un pantalon qui tirebouchonne. En lui remontant les bretelles, on lui redonne une bonne allure, bien ordonnée ; au sens figuré remonter les bretelles pourrait ainsi signifier "rétablir l'ordre" (au besoin avec quelques remarques bien senties).

Et toujours dans le même ordre d'idées, on peut se faire appeler Arthur, avec, là encore, deux origines possibles, aussi pittoresques et non-avérées l'une que l'autre. Durant l'Occupation en France, les Allemands avaient imposé un couvre-feu qui débutait à vingt heures – en allemand acht Uhr. Pour rappeler à l'ordre les passants qui s'aventuraient dans les rues après l'heure fatidique, les soldats allemands indiquaient leur montre en disant acht Uhr ; les Français comprenaient Arthur : c'est peut-être ainsi que de ce rappel à l'ordre est née l'expression se faire appeler Arthur. Autre hypothèse : en argot, un arthur (comme un jules) désignait un proxénète ; l'expression se faire appeler Arthur tout comme se faire appeler Jules qu'on entend parfois était donc tout sauf élogieuse.

Enfin, toujours au chapitre des remontrances, mentionnons l'expression entendre parler du pays. Le parent qui sermonne son enfant en lui disant "si tu continues comme ça, tu vas entendre parler du pays" ne lui promet pas une émission de radio ou de télévision évoquant la douce France, mais plutôt une engueulade bien sentie.

Si, comme certains l'affirment, la langue française est la langue de l'amour, elle est – nous venons de le voir - tout aussi capable de transmettre des sentiments hostiles !

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