samedi 26 août 2017

Épingles et marrons

Tirer son épingle du jeu et tirer les marrons du feu : voilà deux locutions françaises souvent utilisées ; mais connaissons-nous leur sens avec précision ?

Commençons par tirer son épingle du jeu : cette expression signifie "se dégager adroitement d'une situation délicate, se retirer à temps d'une affaire sur le point de mal tourner, sauver sa mise". Souvent, cette expression est toutefois mal employée : combien de fois entend-on dans les médias, par exemple à propos d'une étape du Tour de France, que "tel coureur a tiré son épingle du jeu", simplement pour dire qu'il s'est distingué. Cette locution trouverait son origine au 15ème siècle dans un jeu pratiqué par les petites filles qui devaient, au moyen d'une balle lancée contre un mur, faire sortir des épingles placées au milieu d'un cercle tracé à proximité sur le sol. Mais tirer son épingle du jeu pourrait aussi avoir une signification érotique : dans ce cas l'épingle désigne une partie de l'anatomie masculine qu'il convient de retirer du jeu en temps voulu pour éviter le risque d'une paternité non désirée…

L'épingle se retrouve dans de nombreuses expressions françaises : une affaire peut être montée en épingle dans les médias ; cela signifie qu'on lui donne une importance exagérée. Cette expression provient  sans doute de la joaillerie puisqu'on pouvait monter (ou sertir) une pierre précieuse sur une tête d'épingle qui se trouve ainsi transformée de simple instrument de couture en bijou ornant une cravate, un chapeau ou un vêtement : l’épingle ordinaire fait donc illusion… autant que celui qui monte une histoire en épingle. En tout état de cause, si un jour on a un comportement qui n'est pas irréprochable, attention de ne pas se faire épingler !

Le sens de l'expression tirer les marrons du feu a quant à lui complètement changé au fil des siècles. A l'origine, la locution était tirer les marrons du feu avec la patte du chat ; elle a été popularisée par La Fontaine dans la fable Le Singe et le Chat où le chat Raton retire du feu au profit du singe Bertrand les marrons qui y grillent. Il s'agit donc d'entreprendre une action risquée ou dangereuse pour le profit de quelqu'un d'autre. Or, de nos jours, cette expression est généralement utilisée dans un sens très différent, presque opposé : celui qui tire les marrons du feu tire avantage d'une situation pour lui-même, parfois malhonnêtement. Autrement dit, au risque de se brûler les doigts, on attrape les marrons pour les manger soi-même. Les puristes continueront d'utiliser cette expression dan sons sens originel.

En argot, un marron désigne un coup, tout comme une châtaigne d'ailleurs ; rappelons-nous la chanson de Renaud Laisse béton :

    Y m'a filé une beigne
    J'lui ai filé un marron
    Y m'a filé une châtaigne
    J'ui ai filé mon blouson

Enfin, le jour où l'on se fait épingler suite à une mauvaise action, il vaut mieux éviter de se faire défendre par un avocat marron, c'est-à-dire véreux.

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