En France,
quand on ne mange pas, on parle de la nourriture. À telle enseigne, que les
expressions culinaires pullulent dans la langue française. Celles qui nous
intéressent aujourd'hui nous arrivent tout droit du potager.
Quand des
entreprises ou des candidats à une élection se livrent à une compétition
désordonnée, où tous les moyens sont bons pour arriver en tête, on dit souvent
qu'ils se livrent à une course à
l'échalote. Une échalote serait
une bien humble récompense pour les compétiteurs ; il ne s'agit donc pas du
prix à remporter. A l'origine, dans une course
à l'échalote, les coureurs essaient de retenir leurs concurrents par le
fond du pantalon, ou, si l'on veut, par la peau des fesses, ce qui n'est pas
très réglementaire. Or, en argot, l'oignon désigne l'arrière-train d'une
personne. On peut imaginer que, par plaisanterie, on ait remplacé l'oignon par
l'échalote, une course à l'échalote devenant ainsi une compétition où l'on cherche
avant tout à mettre les bâtons dans les roues de ses adversaires.
Transition
toute trouvée : après l'échalote, les
oignons dont on est parfois invité à
s'occuper. Occupe-toi de tes oignons ou bien c'est pas mes oignons. Comme nous venons
de le voir, l'oignon désigne en argot
le postérieur d'un individu : si l'on dit à quelqu'un "occupe-toi de tes oignons", on
pourrait tout aussi bien lui dire "occupe-toi
de tes fesses", ce qui, vous le reconnaîtrez, est tout de même
beaucoup moins élégant. Mais, dans leur Dictionnaire
du français non conventionnel, Jacques Cellard et Alain Rey proposent une
autre explication : dans le centre de la France, les femmes – c'était une
marque d'indépendance – pouvaient cultiver un coin de jardin pour y faire
pousser des oignons qu'elles allaient
ensuite vendre au marché afin de gagner un peu d'argent. Lorsqu'il leur
arrivait de se mêler des affaires des hommes, ces derniers les renvoyaient à
leur potager en leur disant "occupe-toi
de tes oignons" ou bien "c'est
pas tes oignons" !
Les carottes, on peut les aimer crues ou
cuites. Mais quand les carottes sont
cuites, c'est que tout est perdu et qu'il n'y a vraiment plus d'espoir. Au
XIXème siècle on disait que quelqu'un avait ses carottes cuites lorsque la mort était proche. Cela vient
peut-être du fait que les carottes
étaient l'aliment du pauvre, évoquaient le dénuement et, par extension, la mort.
Autre hypothèse : les carottes cuites
accompagnaient souvent un plat de viande, autrement dit un morceau d'animal
mort.
Quand les carottes sont cuites, c'est
généralement aussi la fin des haricots.
Une fois de plus, deux hypothèses pour l'origine de cette expression : quand,
dans le cadre familial, on voulait jouer à des jeux d'argent on remplaçait
l'argent par des haricots. Pour le
joueur qui avait perdu tout son pécule, c'était la fin des haricots. Ou bien, dans la mesure où les haricots – qui désignaient aussi les
fèves, les pois etc. - étaient un aliment assez bas de gamme et bon marché, lorsque
les pauvres n'avaient même plus de quoi en acheter, c'était réellement la fin des haricots.
À qui
n'est-il jamais arrivé, en voulant entreprendre quelque chose, de faire chou blanc ? Cette expression nous vient
peut-être du Berry où coup se
prononce choup en dialecte berrichon
(comme chacun sait, "une poule cha pond et un chapon, cha pond pas").
Et au jeu de quilles un coup blanc –
qui se prononce chou blanc – était un
coup nul qui ne rapportait aucun point. La situation n'est pas plus glorieuse
lorsqu'on se retrouve dans les choux
: la, c'est la paronymie – c.-à-d. la proximité à l'oreille – entre les choux et échouer qui est à l'origine de cette expression. A l'inverse, il
est beaucoup plus plaisant de faire ses
choux gras de quelque chose, c'est-à-dire d'en retirer profit, de s'en
régaler. En ajoutant de la matière grasse au chou on rend ce mets beaucoup plus attrayant. Petite curiosité
linguistique : en allemand, l'expression das
macht den Kohl nicht fett (mot à mot "ce n'est pas cela qui rend le
chou gras"), signifie qu'une action ne produit pas d'effet, n'améliore pas
la situation.
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