mardi 25 juillet 2017

Parlons cash

La langue anglaise, elle, ne semble pas touchée par le Brexit. Au contraire, elle aurait même tendance à envahir de plus en plus le français, comme on va le voir dans les lignes qui suivent. Curieuse expression, par exemple, que celle-ci : "parler cash" ou même tout simplement "être cash". Cela me fait penser au "parler vrai" cher aux hommes politiques sur le point d'annoncer des hausses d'impôts … Mais pourquoi cash ? L'idée est celle d'un discours franc, direct, voire brutal où le locuteur ne va pas s'embarrasser de diplomatie. Comme dans le cas d'un paiement comptant, l'auteur d'un propos cash dévoile ses intentions sans filtre, alors qu'un propos plus diplomatique évoquerait plutôt un paiement à crédit qui ne produit tous ses effets qu'une fois arrivé à échéance.

Cash n'est que l'un des innombrables emprunts à l'anglais qui parsèment la langue française. Si un propos cash est le plus souvent oral, on peut aussi le trouver dans un mail ou un e-mail. Que celui qui n'a jamais utilisé ce terme jette la première arobase ! Pourtant différentes expressions bien françaises existent pour désigner le courrier électronique : par exemple le courriel que nous devons au génie de nos cousins canadiens francophones, lesquels ont également inventé le terme de pourriel pour désigner le spam ou courrier indésirable. Plus rarement, on rencontre polluriel. Quant à l'origine de mot spam, elle se trouverait dans un sketch des Monthy Python… Outre courriel, le terme de mél a également connu son heure de gloire : formé à partir des premières lettres de message électronique, le mél offre l'avantage d'avoir une prononciation très proche de mail. Et n'oublions pas l'étymologie bien française de mail : la malle poste !

Les TIC (Technologies de l'Information et de la Communication) regorgent de termes anglo-américains. Ainsi la digitalisation est très en vogue ces temps-ci dans le monde de l'entreprise. Nous savons pourtant qu'à l'adjectif anglais digital correspond numérique en français. Alors, pourquoi ne pas dire tout simplement numérisation ? Tout simplement parce que ce terme est déjà pris et désigne le fait de numériser un document au moyen d'un scanneur. Il existe pourtant d'autres solutions, comme par exemple transition numérique, voire révolution numérique pour les entreprises les plus ambitieuses. Il est hélas tellement plus facile de dire digitalisation que de faire l'effort d'utiliser une formule plus authentiquement française.

En 1964, René Étiemble publiait "Parlez-vous franglais", une charge sans concession contre la contamination de la langue française par l'anglais. C'était il y a plus d'un demi-siècle …

2 commentaires:

  1. Souvent, les termes anglais n'ont pas d'équivalent en français. Par exemple " empowerment", traduit par " autonomisation", ce qui n'est qu'une partie du sens, ou , pire, " empouvoirement" au Québec. Je pense que dans notre pays Jacobin et centralisé, le concept même de ceder une parcelle de pouvoir de l'Etat est anathème. Même chose pour " gender mainstreaming",

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    1. Je ne suis pas sûr que le problème soit dû principalement à l'absence d'équivalent. Et d'ailleurs, une langue s'enrichit en se frottant aux autres. Mais ce qui est dommage, c'est que souvent la paresse l'emporte sur la créativité. Mais c'est sans doute la nature humaine ...

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