Durant des mois, le
livre "Le charme discret de l'intestin" a caracolé en tête des
ventes. Surfant sur le succès de cet ouvrage au titre et au contenu improbables,
un auteur, se disant "mentaliste", a voulu prendre de la hauteur en
publiant "Votre cerveau est extraordinaire", puis, plus récemment
"Votre cerveau est définitivement
extraordinaire". Mais que vient donc faire ici cet adverbe définitivement ? C'est, une fois de
plus, un calque de l'anglais definitely,
faux-ami des plus classiques. En bon français, on aurait pu utiliser vraiment, absolument, résolument
etc. Nous n'allons pas condamner définitivement
l'auteur de cet ouvrage, mais simplement l'inviter à utiliser les capacités
certainement exceptionnelles de son cerveau
pour appréhender les subtilités linguistiques de l'anglais et du
français.
Nul ne prétend que le
français est une langue facile ; d'ailleurs, existe-t-il des langues faciles ?
Nous en doutons fort. La langue française est difficile, voire très difficile. Voire et non pas voire même comme on l'entend à longueur de temps sur les ondes et
ailleurs. Voire, du latin verus "vrai", est utilisé
(assez rarement de nos jours) comme exclamation exprimant le doute, comparable
à vraiment dans son sens
interrogatif. Le plus souvent voire
sert à renforcer une assertion, à marquer une gradation : "votre cerveau a
des capacités remarquables, voire
exceptionnelles". Mais pourquoi donc vouloir à tout prix compléter voire d'un même parfaitement inutile ?
Autre formule trop
souvent entendue et résolument pléonastique, pour ne pas dire doublement
pléonastique : au jour d'aujourd'hui.
Quand sait qu'aujourd'hui est déjà
une sorte de pléonasme, c'est vraiment en faire trop. En effet, le hui dans aujourd'hui vient du latin hodie
qui veut dire … aujourd'hui, en ce
jour. Aujourd'hui suffit donc amplement
et, si l'on a envie de varier, on peut dire aussi à ce jour.
Le mot espèce est féminin ! Que cela soit dit
une fois pour toutes ! Alors pourquoi entend-on constamment un espèce lorsque ce terme est suivi
d'un masculin ? Le substantif qui suit espèce
semble produire une espèce de
contagion. C'est bien une espèce (et
en aucun cas un espèce) d'abruti qui
m'a klaxonné alors que je ne démarrais pas assez vite au feu vert.
La paresse, dit-on,
est le corollaire de l'intelligence : si l'homme a inventé la roue, c'est pour
réduire l'effort physique requis pour transporter de lourdes charges. Cette
paresse déteint aussi sur l'expression, par exemple lorsqu'on emploie un
anglicisme au lieu de faire l'effort de chercher un équivalent dans sa langue.
A l'ère des réseaux sociaux, nous avons pris l'habitude de poster des messages, de liker,
voire de commenter des posts. Serait-ce
ringard de publier un message ou d'aimer une publication ?
La paresse linguistique
(nous n'irons pas jusqu'à parler de paresse intellectuelle) conduit aussi de
nombreux locuteurs à employer le verbe solutionner
à la place de résoudre. Bien que
comptant plus de syllabes que résoudre,
solutionner présente l'avantage
notable d'être un verbe du premier groupe, par conséquent beaucoup plus facile
à conjuguer que son concurrent. Encore eût-il fallu que nous résolussions les problèmes posés par la
conjugaison du verbe résoudre. Mais eût-il
été plus élégant que nous les solutionnassions
?
Hui s'entend aussi en provençal , à savoir : "uei"(pron.u-eil)pour dire cejourBonne Dimanchade ( emprunté au Provençal contemporain qui n'aime guère les anglicismes)
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