jeudi 19 août 2021

Une vraie tuerie !


 Le verbe latin cædere, qui signifie frapper, abattre, couper, tuer, massacrer est à l'origine du suffixe français –cide que l'on retrouve dans de nombreux substantifs et adjectifs de notre langue, à commencer par le suicide, le fait de se tuer soi-même.

Ainsi, n'entend-on que trop souvent parler de féminicide – le fait de tuer une femme parce qu'elle est une femme. Dans le passé, le terme d'uxoricide (du latin uxor=femme, épouse) a également existé et désignait le meurtre de l'épouse par son mari, en général pour cause d'adultère de l'épouse en question. Le code pénal de 1810 autorise même officiellement l'uxoricide lorsque l'épouse est prise en flagrant délit d'adultère.

À l'inverse, il n'existe pas de terme établi pour désigner le meurtre d'un homme parce qu'il est un homme. Le coupable d'homicide peut avoir tué indifféremment un homme ou femme (du latin homo=homme au sens d'être humain). On rencontre parfois hominicide ou masculinicide pour préciser que l'homme en question a été tué en raison de son appartenance au sexe masculin. Si la langue n'a pas jugé utile de consacrer formellement un terme à cette action c'est tout simplement qu'il s'agit d'une occurrence extrêmement rare.

On retrouve une telle asymétrie avec le terme fratricide (de latin frater=frère) qui désigne indifféremment le meurtre d'un frère ou d'une sœur. Si le terme de sororicide se rencontre, il n'est quasiment jamais employé. Même chose avec parricide (du latin pater=père) : c'est le fait de tuer son père ou sa mère. On rencontre parfois matricide pour souligner qu'il s'agit du meurtre de la mère. Et bien sûr il y a hélas aussi l'infanticide dont la victime peut être un ou une enfant tué(e) par l'un de ses parents.

Si l'on considère que la langue est le reflet de la société humaine, cette dernière a vraiment le goût de tuer : insecticide, pesticide, bactéricide, virucide, herbicide, fongicide, raticide, souricide, taupicide etc.  Et quand cette propension au meurtre se dirige contre tout un peuple, on est en présence d'un génocide, ou d'un ethnocide lorsqu'il s'agit d'exterminer un groupe ethnique. À l'inverse, quand le peuple se révolte, il peut aller jusqu'au régicide et tuer son roi, voire le tyran : dans ce cas c'est un tyrannicide.

Quant au meurtre de Dieu – ce qui peut tout de même paraître un peu paradoxal, Dieu étant par essence éternel – c'est un déicide, ce terme étant plus particulièrement employé pour désigner la crucifixion du Christ. Enfin, l'actualité de ces dernières semaines a mis au goût du jour le terme liberticide : certains dénoncent comme attentatoires à la liberté des mesures sanitaires dont l'objet est précisément de protéger la vie et de combattre la mort.

Quant aux parents des assassins et meurtriers en tout genre, s'ils avaient pu se douter du destin de leur progéniture, nul doute qu'ils auraient utilisé un spermicide !

3 commentaires:

  1. Lieber Edgar,

    plein d'esprit et un merveilleux exercice lingustique !

    Freue mich, mal wieder von Dir zu hören (bei ARTE ist ja mehr oder weniger "tote Hose" so dass man sich unter Kollegen praktisch nicht mehr sieht) und hoffe, Dir geht es weiterhin gut.
    Beste Grüße,
    Detlef

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  2. Merci beaucoup, Detlef. Und hoffentlich bis bald. Amitiés.

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