Le jaune est très tendance par les temps
qui courent. Il nous a donc paru intéressant de nous pencher sur l'étymologie
et, plus généralement, la sémantique de cette couleur.
Comme nous l'apprend
l'excellent Dictionnaire historique de la
langue française (éditions Le Robert), jaune
nous vient du latin galbus et galbinus qui signifie vert pâle ou
jaune-vert. Cette étymologie apparaît encore plus nettement dans l'allemand gelb et l'anglais yellow. Pourtant l'adjectif latin désignant habituellement la
couleur jaune est flavus (qu'on retrouve dans flavescent).
Depuis le 13ème
siècle, le jaune, également la
couleur de l'or et du safran, désigne la teinte que prend la peau d'une
personne malportante. La jaunisse est
là pour le rappeler. Au sens figuré, la locution familière en faire une jaunisse signifie "éprouver du dépit". Quant
à la redoutable fièvre jaune elle
s'appelle ainsi parce qu'elle est provoquée par un flavivirus (du latin flavus =
jaune).
Le maillot jaune, qui distingue le premier
au classement du Tour de France, s'appelle ainsi en raison de la couleur du
papier du journal L'Équipe lors de la
création de l'épreuve. Le jaune est
choisi comme symbole positif de la couleur solaire.
Mais, à l'exception du
maillot jaune, cette couleur se retrouve
presque toujours dans des expressions à connotation fortement péjorative, comme
par exemple le péril jaune pour
qualifier la menace démographique et aujourd'hui économique qu'on attribue aux
Asiatiques. Le jaune est également la
couleur associée à Judas, mais c'est aussi la couleur du soufre, instrument des
forces lucifériennes. C'est d'ailleurs cette propriété infâmante que l'on
retrouve dans l'ignoble étoile jaune
imposée aux juifs par les nazis en référence au passeport jaune des anciens forçats.
Et quand on dit de
quelqu'un qu'il rit jaune,
qu'entend-on exactement par là ? Deux origines possibles : chez Saint-Simon au
18ème siècle, les hépatiques au teint jaune ne pourraient rire que de manière forcée en raison des
désagréments causés par leur maladie. Mais beaucoup plus tôt, en 1640, on
trouve sous la plume d'Antoine Oudin, interprète à la cour de Louis XIII,
l'expression "il rit jaune comme
farine" ; or, dans l'argot de l'époque, la "farine" ne désignait
pas l'aliment, mais une personne vicieuse. Par conséquent "rire jaune" voulait dire rire de
manière malsaine et dissimulatrice.
Sont également
qualifiés de jaunes les briseurs de
grève, par référence au syndicalisme jaune
qui s'oppose au syndicalisme rouge révolutionnaire. L'emblème des syndicats jaunes créés en 1899 était un brin de
genêt et un gland jaune.
Et comment ne pas
conclure ce billet sans évoquer le jaune,
la couleur des … cocus. C'est en raison de toute la symbolique négative
attachée à cette couleur qu'on l'attribue ainsi aux cocus. La locution être peint en jaune signifie "être
trompé par sa femme".
P. S. Si les gilets
que les automobilistes sont tenus d'emporter dans leur voiture sont jaunes, c'est pour pouvoir être vus de
loin, sécurité oblige.