Les fruits
et les légumes sont omniprésents dans la langue française. Le présent billet se
veut fruité.
Commençons
par la prune : selon qu'on se prend une prune ou qu'on fait
quelque chose pour des prunes, la prune coûte cher ou, au contraire, ne
vaut rien. Se prendre une prune
signifie, en langage familier, voire argotique, recevoir un avis de
contravention et donc être condamné à une amende ; mais pourquoi donc une prune ? Il faut remonter au Moyen Âge où
le terme de prune était synonyme de coup
de poing ou de pied, autrement dit quelque chose de douloureux, comme une contravention
par exemple. On retrouve d'ailleurs cette étymologie dans le terme de pruneau qui désigne en argot une balle
d'arme à feu. Longtemps, les avis de contravention ou prunes furent apposées sur les pare-brise des véhicules en
infraction par des aubergines en
référence à la couleur de l'uniforme porté par les auxiliaires de police ou contractuelles
chargées de cette tâche ingrate. Lorsque leur uniforme passa du violet au bleu
elles quittèrent le potager pour les massifs fleuris et furent baptisées de pervenches.
À
l'inverse, si le présent blog n'avait quasiment pas de lecteurs et si je me
donnais tout ce mal pour des prunes,
je m'interrogerai sérieusement sur l'utilité de poursuivre cette entreprise. Ces
prunes sans valeur nous font remonter
aux premières croisades, au XIIème siècle. Selon la légende, lors de
la 2ème croisade qui se solda par un échec, les croisés rapportèrent
de Damas des pieds de pruniers dont il avait pu goûter les excellents fruits.
Lorsqu'ils rendirent compte au roi de leur expédition à la fois infructueuse et
fructueuse, celui-ci leur aurait reproché de n'être allés si loin que pour des prunes, autrement dit pour rien.
L'histoire
ne dit pas si, accablés par les reproches royaux, certains Croisés tombèrent dans les pommes. Une fois de
plus, nous voilà en présence d'une expression à l'origine controversée. Pour
les uns, les pommes sont une
altération de la pâmoison, puisque se pâmer ou tomber en pâmoison voulait dire s'évanouir, perdre connaissance. Mais
sachant que l'expression tomber dans les pommes
date de la fin du XIXème siècle alors que la pâmoison a disparu du vocabulaire au XVème siècle, il
est permis de douter de la filiation entre ces deux expressions. Pour les
autres, c'est à George Sand que revient la paternité - ou devrait-on dire la
maternité - de cette expression : en effet, dans l'une de ses lettres, elle écrit
qu'elle est dans les pommes cuites
pour dire qu'elle est extrêmement fatiguée ; on peut rapprocher cette formule
de l'expression être cuit pour
désigner un état de grande fatigue, éventuellement susceptible de causer un
évanouissement.
Incontestablement,
il vaut mieux avoir la pêche ou la banane ! Celui qui a la pêche est plein d'énergie, de dynamisme.
Là encore, deux origines possibles : la culture chinoise, où la pêche est signe de vitalité et de bonne
santé ; ou bien la boxe, ou l'expression
avoir la pêche signifie avoir beaucoup de force. Nous allons couper la poire en deux et attribuer
l'origine de cette expression à la boxe chinoise ! Quant à la banane, celle-ci traduit la
satisfaction, le contentement, par référence au sourire auquel fait
naturellement penser la forme de ce fruit. Sourire qui n'est hélas plus de mise
chez celle ou celui qui sucre les fraises
: cette expression bien peu charitable qui date de la fin du XIXème
ou du début du XXème siècle désigne une personne affectée de
tremblements en raison de son âge avancé et qui, bien involontairement,
reproduit le geste que l'on fait lorsque qu'on saupoudre de sucre un aliment,
comme par exemple des fraises.