dimanche 3 janvier 2021

Le français est une langue formidable !


En ce début d'année et de décennie, j'adresse aux fidèles – et nouveaux – lecteurs de ce blog mes vœux la plus chaleureux. Contrairement à ce que j'imaginais, vœu n'a rien à voir avec le verbe vouloir qui nous donne pourtant l'homophone "je veux". Vœu est issu du latin "votum" qui désigne à l'origine une promesse faite aux dieux en échange d'une faveur demandée ou accordée, et par extension, un objet votif, que l'on pourra vouer à une divinité. La même étymologie nous a également donné vote. De là à penser que l'expression d'un vote n'est rien d'autre qu'un vœu pieux, il y a un pas que je m'abstiendrais de franchir car je voue un profond respect à la démocratie électorale.

Mais je m'éloigne de l'objet initial de ce billet qui était de vous proposer un petit florilège (étymologiquement un bouquet de fleurs choisies) d'expressions françaises commentées avec grâce et humour par Alain Rey, récemment disparu, dans l'ouvrage "150 drôles d'expressions que l'on utilise tous les jours sans vraiment les connaître", que je ne saurais que trop vous recommander.

Alors qu'en violation flagrante de toutes les règles en vigueur en ce moment vous vous apprêtiez à faire la nouba, vous dûtes (jolie, la deuxième personne du pluriel du passé simple du verbe devoir, n'est-ce-pas ?) finalement renoncer à votre projet faute de moyen de transport adéquat. Vous avez, en quelque sorte, raté le coche. Qui aurait pensé que ce coche – et ses dérivés coach (en anglais et en franglais) et cocher – nous vient du hongrois, plus précisément de "kocsi", terme lui-même issu de "Kocs", nom d'un relais de poste sur la route entre Vienne et Pest ?

Mais quid de la nouba ? Il s'agit de l'un des nombreux emprunts du français à l'arabe, en l'espèce "nuba" en arabe maghrébin qui correspond à "nawba" en arabe classique : ce terme signifie "tour" au sens de "tour de rôle". Chez les militaires de l'autre côté de la Méditerranée, ce terme désignait un service de garde effectué à tour de rôle. Or, l'usage voulait que les soldats jouent périodiquement de la musique devant la maison de l'officier ou du dignitaire qu'ils gardaient : les musiciens prenaient cette fonction en se succédant, chacun à son tour. Par extension le terme de nouba désigna le type de musique joué à cette occasion, principalement des airs populaires d'Afrique du Nord interprétés le plus souvent avec des fifres et des tambourins. Ce sont les tirailleurs algériens de l'armée coloniale qui ont importé la nouba en métropole à la fin du XIXe siècle. Bien avant la teuf d'aujourd'hui, la nouba désignait des réjouissances collectives tout comme la bamboche, la bamboula, la bombe, la bringue, la fiesta, la java ou la noce !

Au cours de cette détestable année 2020 que nous allons nous empresser de jeter aux oubliettes, nombreux ont été ceux qui ont eu le sentiment de se retrouver au bout du rouleau. Rien à voir avec la ruée sur les stocks de papier hygiénique au début du confinement (même si l'épuisement de ce rouleau-là peut entraîner une situation fort inconfortable). Dans le cas présent, ce rouleau au bout duquel on se retrouve était à l'origine un rollet ou petit rôle (au sens de rôle de théâtre) : le texte que l'acteur médiéval devait déclamer était écrit sur un rouleau de parchemin ; lorsque le rôle était bref, on se contentait d'un rollet. Arrivé beaucoup trop vite au bout du rouleau (du rollet), tout espoir de gloire s'envolait. Le rôle des impôts ou du tribunal vient également de là : actes, listes, registres à caractère officiel. Et lorsqu'un registre est tenu en double car il s'agit d'actes très importants, on a un contre-rôle, qui permet… le contrôle. Malheureusement, le fisc, lui, ne semble jamais être au bout du rouleau !

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